Transmettre la foi : Rassemblement inter générations pour le discipulat
Quand j'étais enfant, je passais souvent du temps avec mon grand-père dans son jardin. Il prenait son jardin très au sérieux et il y avait toujours des tâches qu'un jeune petit-fils pouvait faire pour mettre la main à la pâte. Qu'il s'agisse de verser du sel sur les limaces au crépuscule (ma tâche favorite), de désherber et d'arroser jusqu'à la récolte des légumes, il y avait une multitude d'occasions de passer du temps à apprécier mon grand-père et à apprendre de lui.
Il me racontait souvent des histoires sur sa jeunesse, les difficultés que sa famille avait dû surmonter, sur ses parents que je n'avais jamais eu la chance de connaître, et sur sa propre enfance et sa scolarité. Il a grandi à l'époque où les écoles ne comptaient qu'une salle de classe unique. Lorsque j'étais enfant, cette idée me fascinait. Une école entière concentrée dans une seule salle : l'apprentissage, les jeux et les interactions avec des élèves dont la différence d'âge pouvait être de dix ans ou encore davantage.
Quand j'étais plus jeune, cette idée semblait saugrenue, mais en vieillissant et au fur et à mesure des années de scolarité dans ma propre vie, je trouve l'idée attrayante et fascinante. Une école avec une classe unique aurait donné de nombreuses occasions d'apprendre des autres chaque jour et d'apprendre à connaître ces personnes, à la fois du fait de cette proximité et grâce aux matières enseignées. Et même si vous n'aviez été scolarisé(e) que jusqu'à 14 ou 15 ans, vous auriez quand même été en contact étroit avec des camarades qui auraient eu dix ans de plus ou de moins que vous - créant un cercle de relations et une communauté qui lie ensemble des générations entières. Cela se faisait pour des raisons pratiques et en raison d'un manque d'enseignants, mais les liens et les interactions établis dans ce type de parradigme sont des choses qui semblent manquer dans notre culture actuelle.
Pour être clair, je reconnais que compte tenu de l'urbanisation croissante en cours dans le monde entier, il serait peut-être plus nuisible que bénéfique de revenir à ce mode de scolarisation. Mais plus je vieillis plus je suis convaincu que l'école à classe unique permettait des interactions qui sont rarement possibles aujourd'hui : des interactions délibérées et longues entre des groupes d'âges variés au fil de notre développement et de notre croissance.
C'est l'essence du discipulat chrétien : être impliqués mutuellement dans nos vies à un tel degré que nous voyons à la fois les succès et les échecs, que nous comprenons les habitudes et les tendances de notre entourage afin que nous puissions continuellement suivre cette règle : « Exhortez-vous réciproquement, et édifiez-vous les uns les autres » (1 Thessaloniciens 5.11). Ce type de lien ne peut pas advenir sans la proximité constante que permettent les rassemblements. Lorsque des personnes se rassemblent régulièrement, une multitude de relations, de compétences, de connaissances spirituelles et de passions sont échangées qui forment une communauté plus forte que toute autre communauté qui serait définie par des critères démographiques.
Par la puissance du Saint-Esprit, nous grandissons en tant que communauté dans notre foi partagée, dans nos actions et nos interactions les uns avec les autres, mais les occasions qui nous sont offertes de le faire semblent régulièrement diminuer. Des livres comme The Loneliness Epidemic (L'Épidémie de la solitude, de Mettes) ont mis en lumière le fait que nos relations et les opportunités de tisser des liens s'évaporent dans nos sociétés actuelles. Et, outre le problème croissant de la solitude au sein de notre propre groupe démographique, notre capacité à créer des relations signifiantes avec des personnes de générations différentes diminue également.
Alors que devons-nous faire ? Qu'ont fait les chrétiens dans des situations similaires par le passé ? Un exemple pertinent sur lequel je suis tombé pendant mes études est celui des livres de Dietrich Bonhoeffer. Le ministère de Bonhoeffer a eu lieu en grande partie dans l'entre-deux guerres - une période où il y avait littéralement un fossé entre les générations. De nombreux pays ont terminé la Grande Guerre avec un trou énorme dans leur culture, des millions de jeunes hommes ayant été victimes de « la guerre pour mettre fin à toutes les guerres » et aussi de la famine et de la pandémie qui suivirent peu de temps après. Cela posait plusieurs questions : Comment devenons-nous disciples ? Comment formons-nous une communauté ? Surtout lorsque nous avons perdu une génération entière (ou plus) de notre entourage ? Bonhoeffer a considéré tout cela et dans son livre Vivre en disciple : Le prix de la grâce, il partage avec nous une sagesse incroyable.
Le premier point pertinent qu'il mentionne à ce sujet est la description du temps passé ensemble comme un apprentissage des disciplines spirituelles au sein de la communauté de foi. Contrairement à l'apprentissage d'un métier, l'apprentissage des disciplines spirituelles peut être bénéfique dans les deux sens - pas seulement pour l'enseignant et l'élève, mais aussi pour les ouvriers qui collaborent au sein du royaume. Il va même jusqu'à dire que l'apprentissage devrait être considéré comme le chemin menant à « l'ordination de ses membres pour le service ». De la même façon que nos pasteurs suivent un processus d'ordination où l'on rend compte de ses progrès au sein de cohortes et avec des mentors, l'apprentissage devrait également être un élément essentiel de la vie d'église.
Le deuxième point qu'il souligne est que ces types de relations ont besoin d'espace pour grandir et s'épanouir. Les relations dans une communauté de foi ont besoin d'espace pour s'élargir, découvrir de nouvelles choses et commettre des erreurs. Nous devrions moins nous concentrer sur les résultats obtenus lors d'un apprentissage au sein de l'église et plus sur la relation glorieuse et divine qui a permis de combler les fossés séparant différentes générations. Cela entraînera plus de variété au sein de nos églises. Lorsque nous rechercherons la normalisation d'une culture d'apprentissage dans nos églises, nous verrons émerger les différentes personnalités et spécificités de nos congrégations. Au lieu de chercher la standardisation de notre communauté, nous devrions plutôt savourer la nature nuancée de nos relations.
C'est la beauté de la communauté de Dieu sous son meilleur jour, et cela commence par l'engagement des responsables de l'église à inviter continuellement d'autres personnes à rejoindre notre cercle d'expertise. Les églises ont souvent une hiérarchie de compétences dont l'importance est perçue - les talents d'orateur, le chant, l'enseignement, etc. - qui sont souvent mises en avant dans notre conception du service dans l'église. Mais dans un modèle d'apprentissage, nous avons tous quelque chose de significatif à apporter à la jeune génération de croyants. Cela commence par le fait d'inviter quelqu'un à venir à vos côtés, à passer du temps et à interagir avec vous de manières variées, et de se soutenir mutuellement dans la croissance et la maturité dans notre foi. L'église assume ensuite la responsabilité de fournir l'espace et le temps nécessaires pour que ces relations grandissent et que ces compétences et cette expertise soient utilisées au sein de la communauté des croyants. En conséquence, l'église entière grandit dans ses relations et apprécie toujours davantage les membres de la communauté, et les membres de la communauté grandissent en maturité et dans la profondeur de leur service les uns à côté des autres.
Jonathan Eigsti est pasteur titulaire de l'église du Nazaréen Independence Trinity à Independence, dans le Missouri aux États-Unis.
